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Burkinaventure
9 septembre 2021

Le coton au Burkina :la prochaine édition du SICOT se déroulera les 27 et 28 janvier 2022 à Koudougou

L’ « OR BLANC » DU BURKINA Le Burkina Faso, comme d’autres pays de la région sahélienne fait régulièrement la une des journaux télévisés qui nous montrent des images poignantes de désolation, qu’il s’agisse d’attentats, d’inondations, de sécheresses et de déplacement de populations. Nul ne peut contester cet état de chose. Cependant l’effet loupe des medias pourrait laisser à penser que le pays est à l’arrêt, tétanisé par tous ces malheurs. Or ce n’est pas le cas. Les Burkinabè s’adaptent et continuent à mener une existence la plus normale possible. Ils étudient, travaillent, innovent, produisent, exportent ; les Gouvernants prennent des mesures tous les jours, rencontrent des partenaires étrangers et signent des accords internationaux, même si le contexte est parfois difficile. C’est la raison pour laquelle nous avons pris l’exemple du coton pour montrer que le pays continue bien sa marche sur le chemin du développement. Si l’or métal représente le premier produit d’exportation du Burkina Faso (70%), le coton compte pour 11%, ce qui est loin d’être négligeable pour un pays encore en grande partie peuplé de cultivateurs. Il génère 15% du PIB du pays et représente 65% des revenus des ménages Au temps de la Révolution de 1983, il est devenu le symbole même du « Pays des Hommes Intègres ». Mais cela n’a pas toujours été le cas tout au long de son histoire. Déjà, à l’époque précoloniale, il était utilisé chez les Mosse pour des besoins domestiques comme des habits, les rites funéraires; et les bandes de coton servaient de monnaie d’échange contre des produits comme le sel gemme. La France songea à réintroduire le coton et créa l’Association Coloniale Cotonnière (ACC) en 1903. Mais le coton connut une émergence difficile car cette « spéculation agricole » fut rendue obligatoire de 1924 à 1929 afin de financer les infrastructures de la colonie. Autant dire que cette forme de coercition la rendit plutôt impopulaire auprès des paysans locaux. A partir de 1932, le modèle de production traditionnelle devint prépondérant et 1949 vit la création de la Compagnie Française pour le Développement des Fibres Textiles (CFDT), ancêtre de la SOFITEX actuelle. Elle permit l’appropriation de la culture du coton par le cultivateur africain. Les résultats ne tardèrent d’ailleurs pas à se faire sentir puisque la production passa de 3 528 tonnes en 1924-25 à 20 560 en 1960.

Le début de la période postcoloniale se caractérisa par un engagement fort des pouvoirs publics en faveur de cette plante promise à un grand avenir, comme dans le Sud des Etats-Unis, à la faveur de la Révolution industrielle. La transformation sur place devint la voie à suivre et les usines d’égrenage se multiplièrent (Bobo Dioulasso, Ouagadougou, Koudougou…). Après une évolution en dents de scies le Burkina devint le premier producteur africain en 2012. Aujourd’hui, il n’est plus que troisième, derrière ses voisins béninois et ivoiriens. Le Burkina Faso a néanmoins produit 472 000 tonnes de coton graine en 2020/2021 et les prévisions pour la prochaine campagne sont de 627 500 tonnes. Le Burkina a cherché à se diversifier en misant sur le coton biologique sans OGM ; c’est ainsi que la SECOBIO (Société d’Egrenage du coton biologique) a été créée à Koudougou avec la participation à 51% de l’Union Nationale des producteurs de coton du Burkina Faso (UNPCB). L’inauguration s’est déroulée le 30 janvier 2020 à l’occasion du salon SICOT dont le thème était : « Production et transformation du coton : moteurs d’industrialisation et de croissance économique pour les Etats Africains ». Les unités de production les plus énergivores s’établiront dans la capitale, alors que la teinture et la confection seront traitées à Bobo-Dioulasso et à Koudougou. Cette nouvelle orientation de la filière coton est la première en Afrique de l’Ouest et représente 2% de la production totale du coton burkinabè. Une petite unité de production de coton hydrophile à usage pharmaceutique a vu le jour et le coton tissé au Burkina fait l’objet d’un effet de mode : Faso Dan Fani, qui signifie « pagne tissé de la patrie », et collections de vêtements contemporains font fureur. Le coton est un produit indispensable au Burkina Faso dans sa marche vers un développement durable et inclusif. Les hommes qui cultivent majoritairement et les femmes qui filent et teignent. Non seulement, il contribue en grande partie à ses exportations, mais il est un facteur essentiel de lutte contre la pauvreté et l’exode rural. Ce sont plus de 350 000 exploitations agricoles majoritairement familiales qui emploient en moyenne huit actifs, soit environ 2.8 millions de personnes et un total de 4 millions si on inclut les emplois indirects. C’est dire son importance vitale pour le pays, en termes de revenus des ménages et de balance commerciale. Il n’en demeure pas moins que cette quasi monoculture est soumise à de nombreux aléas ne relevant pas tous des pouvoirs publics, tant s’en faut. La désertification du Sahel, qu’elle soit liée ou non au réchauffement climatique est un fait incontesté. La région Ouest du pays où se trouvent la majeure partie des exploitations est soumise à une pluviométrie capricieuse. L’insécurité qui règne ça et là depuis plusieurs années pénalise les récoltes, rend plus hasardeux les transports, qu’il s’agisse de l’approvisionnement en intrants à 97% d’importation, ou de l’acheminement du coton vers sa destination de traitement ou d’embarquement. Si bien que dans l’Est du Burkina, la production a chuté de 70% cette année. Le marché international est également un facteur que les autorités doivent prendre en compte : le coton est de plus en plus concurrencé par les fibres synthétiques, le nombre d’acheteurs se réduit à quelques grands groupes qui dictent le prix de vente et les exportateurs étrangers se livrent à une concurrence déloyale ; l’exemple le plus caractéristique est celui des Etats-Unis qui subventionnent leurs producteurs jusqu’à 50% du prix d’achat. La reprise des commandes par les Asiatiques, suite au fléchissement de la consommation due au COVID 19, devrait cependant plaider en faveur d’une reprise de la demande.

L’Etat burkinabè a toutefois le pouvoir d’agir afin de limiter les handicaps que nous venons d’évoquer : il peut favoriser le regroupement d’exploitations pour les rendre plus compétitives, en intensifiant les cultures ; mieux valoriser les sous-produits, contribuer à la modernisation des outils de production et diminuer la part du coton exporté en le transformant et en l’utilisant localement. Le nouveau marché continental ouvert le 1er janvier 2021, devrait faciliter les échanges interafricains. Conscients de ces problématiques, le Burkina Faso organise tous les deux ans un salon international du coton depuis 2018. La prochaine édition du SICOT se déroulera les 27 et 28 janvier 2022 à Koudougou, sous le très haut patronage du Président du Faso autour du thème : « La transformation locale du coton : quels modèles d’industrialisation pour l’Afrique dans le cadre de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) ? ». Cette troisième édition constituera une plateforme d’échanges et de réflexions autour de professionnels de toute la chaine du coton et des opportunités de développement du textile. Les 1 500 participants, en présentiel et en virtuel qui sont attendus, représenteront tout les métiers qui touchent de près ou de loin au coton, à la production, à la commercialisation, au financement; des décideurs politiques et économiques, ainsi que des représentants des organisations d’intégration régionale et internationales et de la société civile seront également présents. Ce salon devrait connaitre un engouement certain, malgré un contexte difficile. Mais ne dit-on pas que les grandes décisions se prennent et les meilleures affaires se réalisent lorsqu’il y a urgence ? C’est en tout cas ce que laisse augurer ce grand forum du coton.

Marc Aicardi de Saint-Paul Chevalier de l’Ordre National

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